Le passage dans l’Atlantique Nord ou La Nuit ou j’ai gagné mes galons de capitaine

« When the light begins to change

I sometimes feel a little strange

A little anxious when it’s dark

Fear of the dark

Fear of the dark

I have a constant fear that something’s always near »

Fear of the dark de Iron Maiden

13 octobre, enfin la fenêtre météo que nous attendons depuis maintenant 8 jours pour faire notre passage dans l’Atlantique Nord de Sandy Hook jusqu’à Cape May, s’est confirmée. Pas une fenêtre idéale car il annonce un peu de vent (5 à 10 kn max et principalement du sud) mais une mer relativement calme (3 à 5 pieds de vagues) malgré la fin de la tempête Melissa au large et en prime la pleine lune, alors on s’est lancé. On se dit qu’on fera une traversée voile-moteur et ça nous va très bien.

La veille du départ, plusieurs bateaux dont plusieurs québécois sont venus attendre à l’ancre à Sandy Hook car tout le monde attend avec impatience des conditions clémentes afin de descendre plus au sud. Nous sommes environ une vingtaine de bateaux à attendre et on peut sentir de l’excitation dans l’air car pour la plupart, c’est un premier passage en mer et en plus dans l’Océan Atlantique Nord. Dans tous les livres et les guides qui parlent de ce voyage, ce passage est déterminant car si tu survis haha, tout l’équipage est super fier de cette réalisation.

Petite parenthèse, le 13 octobre est aussi le 60e anniversaire de mon papa cette année. Heureusement, nous avons fait un Facetime avec toute la famille la veille afin de lui souhaiter bonne fête et lui donner son cadeau familial dont il rêve et dont il nous parle depuis genre 20 ans, soit un billet pour le Super Bowl à Miami en février 2020. Il était tellement content, je regrette de n’avoir pas pu voir sa réaction en personne mais faire une aventure telle que la nôtre implique que nous ne pouvons malheureusement vivre ce genre de moment avec nos familles et amis.

Revenons à notre traversée, vu que nous avons calculé que le trajet Sandy Hook à Cape May nous prendra de 20 à 24 heures dépendamment des conditions, notre plan était de quitter notre ancrage entre 11h et midi le 13 octobre afin d’arriver le matin du 14 octobre de clarté à Cape May. Une des règles d’or en bateau, c’est que tu n’arrives jamais de nuit dans un endroit que tu ne connais pas alors il faut vraiment bien planifier, calculer la distance et connaitre la vitesse de ton bateau.

Vers 11h30 on se lance. Il y a de la houle lors du départ car beaucoup de gros bateaux moteur se promènent dans la baie et nous font des belles vagues. On dépasse la pointe de Sandy Hook et bien oui, nous voilà dans l’Océan Atlantique Nord. Marc-André à même aperçu un dauphin.

Je commence à avoir les genoux un peu mous car je trouve que les vagues sont un peu plus grosses et longues que je m’attendais. Je commence à avoir un vague mal de coeur juste après nous avoir fait des grilled cheese pour dîner. Ça commence vraiment bien… Je me prends une gravol et je regrette déjà de ne pas avoir pris avant de partir ce matin, le médicament contre le mal de mer que notre médecin nous a prescrit (il faut le prendre AVANT d’avoir le mal de mer). Nous nous sommes dit que ça ne serait pas nécessaire vu que la navigation serait relativement calme. Après tout, des vagues de 3-4 pieds au Lac Champlain on l’a déjà vécu souvent…

Quelque temps après ça va mieux. Capitaine Marc-André est bien relax. Je me calme un peu mais je trouve que la mer est toujours grosse. Nous avons décidé d’aller plus au large (environ 4-5 miles nautiques des cotes) car il y a beaucoup moins de trafic maritime et d’obstacles à la navigation (bouées, secteurs de pêches, haut-fonds etc…). Donc comme ce passage implique que nous devrons naviguer toute la nuit et qu’en plus notre radar ne fonctionne toujours pas, on préfère être plus loin des cotes. Familles et amis rassurez-vous on voit toujours la terre. De toute façon vu que c’est la pleine lune cette nuit ce sera presque comme naviguer en plein jour.

On écoute de la musique et des podcast et l’après-midi se termine. Le soleil se couche mais on ne le voit pas car c’est de plus en plus nuageux, ce qui augure mal pour Madame Lune et notre super belle navigation de nuit sous la pleine lune. Malgré tout, le paysage est d’une beauté majestueuse, quelle expérience nous vivons.

Par contre, dès que le soleil se couche, on dirait que les vagues grossissent de plus en plus et comme elles viennent de l’est, elles tapent directement sur le côté du bateau vu que nous allons vers le sud, faisant osciller de droite à gauche le bateau.

Le Capitaine descend faire le souper vers 19h. Les dernière lueurs du jour se dissipent tranquillement et il commence à faire noir. Madame Lune est cachée derrière les nuages. Le vent se lève et les vagues grossissent. On se prend des gravols parce que le mouvement du bateau commence à faire son effet. Bonjour mal de mer!

Après cela, le vent forcit et nous avons de la pluie en prime. La mer est de plus en plus grosse et vu qu’il fait tellement noir, nous n’arrivons pas à analyser d’ou les vagues viennent afin de corriger notre trajectoire car maintenant elles semblent venir de partout. On suivait à environ 5 miles nautiques de nous une barge qui nous montrait le chemin et nous assurait qu’aucun autre gros navire croiserait notre route, mais là on doit se dérouter et essayer d’aller un peu plus au large en trajectoire sud-est, pour avoir les vagues de côté-face. C’est pas mieux. On essaie vers le sud-ouest, toujours pas mieux.

Le Capitaine commence à avoir la face du petit gars dans le film Le sixième sens et il est blanc comme un drap.

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I see dead people-le petit gars du film

Les déferlantes commencent à passer par-dessus l’avant du Air Cool et le bateau tape durement dans les vagues. C’est de moins en moins le fun. Pis il est juste 11 heures pm, je calcule donc qu’il nous reste encore 7-8 heures de noirceur dans ces conditions. On se texte avec Louise et Pierre de Point Final!, eux aussi ça brasse en masse et ils ont hâte d’arriver tout comme nous. On voit les lumières rouges d’Atlantic City au loin et quelques lumières de navigation des autres bateaux que l’on croise.

Les lumières intenses d’Atlantic City vue du large vers 2h du matin (ma seule photo de nuit)

À noter que nous sommes invisibles pour les autres bateaux à part pour nos lumières de navigation. Notre fichu radar qui ne fonctionne pas en plus et qui nous permettrait de voir les obstacles… Nous aurions payé cher à ce moment-là pour qu’il fonctionne correctement… Mais c’était impossible de trouver un expert certifié ou nous étions. Nous sommes donc hyper vigilants, nous regardons systématiquement nos deux systèmes de navigation et repérage.

Marc-André semble se sentir de moins en moins bien et ça m’inquiète. Il a vraiment beaucoup beaucoup le mal de mer. Je lui propose alors d’essayer de dormir un peu dans le cockpit pour qu’il se sente mieux. Il est deux heures du matin. Je sais qu’il n’a pas essayé cette solution avant parce qu’il ne voulait pas me laisser barrer seule dans ces conditions, moi qui est beaucoup moins à l’aise que lui même en conditions parfaites. Mais là on n’a plus le choix.

Donc, deux heures du matin, il fait noir….. mais tellement noir…. Je m’attache au bateau car M-A s’endort. Il me semble que les vagues sont de plus en plus grosses et qu’elles déferlent toujours plus sur le bateau. Le bateau cogne toujours dans la vague. Fluffy dort avec son papa mais lève constamment la tête quand elle sent qu’une vague cogne plus fort sur le bateau. Le vent faiblit soudainement et je dois ajuster la bôme de la grand voile. Je regarde les deux systèmes de navigation aux 2 minutes. Heureusement que Serge, petit nom de notre pilote automatique barre comme un chef.

Il pleut. Il fait Noir. Il fait Nuit. Il y a des Grosses Vagues. Marc-André est K.O. Seule pour conduire le bateau. Pas les conditions gagnantes…

J’ai un peu peur et je n’ai pas assez confiance en mes capacités. Ce moment est arrivé trop vite dans ma carrière de navigatrice mais là j’y suis. Je me suis parlé beaucoup intérieurement jusqu’à ce que je me calme. Ça va bien aller. J’ai écouté de la musique à tue-tête et j’ai barré jusqu’à 6 heures du matin soit tout près de Cape May. Madame Lune est sortie de ses nuages pour nous dire bonjour vers 6h30, mais rendu là c’était trop tard. Le soleil se lève tranquillement et on croise des bateaux de pêche. Marc-André reprend la barre car on approche de l’entrée de Cape May, je commence à être fatiguée, je cogne des clous et c’est périlleux d’entrer dans le « inlet ».

Dans le « inlet », ça fait comme un entonnoir entre la mer et le port et les vagues sont grosses et non régulières mais le Capitaine négocie l’entrée comme un chef et nous nous ancrons à côté de notre voilier ami Point Final!.

Dès qu’on met l’ancre, on s’effondre littéralement dans le lit, Fluffy inclus. Je pensais bien dormir mais je suis encore sous le coup de l’adrénaline alors mes yeux ne ferment pas. Mon corps se sent encore comme si on était en mer, c’est beaucoup trop tranquille à l’ancre… Je me lève et je vais mettre de l’ordre dans le bateau qui après ce passage en mer, a besoin d’un ménage et un nettoyage en règle afin d’être habitable de nouveau.

La journée finit par un bon souper de fruits de mer au Lobster House à Cape May, tout près de notre ancrage, avec nos amis de Point Final! ou l’on échange sur le passage en mer et nos expériences mutuelles. Tous les équipages ayant pris la mer cette nuit-là en ont eu pour leur argent…. même les plus expérimentés. Notre ami Pierre dit que dès qu’ils ont fermé la lumière…. (que le soleil s’est couché)…. on s’est vraiment fait brasser. Si tu ne l’as pas vécu c’est assez difficile à décrire.

Malgré tout, une fois cela passé, nous sommes très fiers tous les quatre d’avoir réussi ce passage et nous sommes dorénavant des « Salty sailors » car nous sommes maintenant des marins d’expérience qui ont fait un passage important en mer 😉 .

Hé oui, l’eau est maintenant salée et nous pouvons déjà sentir le changement de température et d’humidité vu que nous sommes plus au sud (mais vivement la Floride). Nous voulions visiter Cape May et faire un arrêt bien mérité pour quelques jours mais en consultant la météo ce soir-là, ça nous confirme que le lendemain est la seule journée possible afin de traverser la hasardeuse baie du Delaware car de forts vents sont annoncés pour le reste de la semaine….

Nous aurions bien pris une ou deux journées relax afin de se remettre du passage dans l’Atlantique Nord mais ça ne sera pas possible, alors dès le lendemain matin on lève l’ancre afin de vivre de nouvelles aventures dans la Baie du Delaware et le C & D Canal!

Souvenir d’un coucher de soleil dans l’Atlantique Nord

Manhattan et une explosion à Sandy Hook

On aperçoit Manhattan au loin

Belle journée ensoleillée, direction Manhattan, nous avons environ 30 miles nautiques à faire en partant de Croton-Ville (soit environ 6 heures de navigation).  Environ 1 heure après le départ, le Capitaine me demande si j’ai fermé l’interrupteur de navigation.  Moi de le regarder avec des points d’interrogations dans les yeux car bien sûr je n’aurais pas fermé l’interrupteur des instruments de navigation puisque justement nous sommes en navigation.

Le Capitaine me demande d’aller voir à l’intérieur du bateau, pour me rendre compte à ce moment que plus rien ne fonctionne dans le panneau électrique, ce que je lui fais part un peu paniquée.  Au moins le gouvernail fonctionne…  Mais c’est à peu près la seule chose qui fonctionne dans le bateau.  Je prends la barre et Marc-André descend voir dans le bateau qu’est-ce qui cause encore un problème.

Après quelques minutes de tergiversations (c’est-à-dire gosser dans le panneau électrique sans aucun résultat), Marc-André ouvre la porte de la chambre dans laquelle se trouve les interrupteurs de batterie et incidemment ce qui amène le courant au panneau électrique.  En plus des interrupteurs de panneau électrique, Fluffy se trouve également dans la chambre.  On essaie toujours de comprendre à ce jour de quelle façon elle a pu fermer les interrupteurs mais croyez-le ou non elle y est arrivée…

Une fois ce petit moment de rush d’adrénaline passée, nous avons fait une super belle navigation et lorsque nous avons pu apercevoir Manhattan au loin, nous avons eu un moment d’émotion et nous nous sommes dit « wow on fait vraiment ça en ce moment et on va arriver par la Hudson à Manhattan avec notre voilier!! ».  Le feeling est vraiment merveilleux et difficile à décrire.

Nous nous approchons tranquillement de New York et soudainement, nous entendons un gros bruit au-dessus de nos têtes.  Quatre jets supersoniques étaient venus nous souhaiter la bienvenue à Manhattan.  C’était vraiment impressionnant.

Nous arrivons à la marina de la 79th Street à Manhattan, ou le plan est de se prendre une boule d’ancrage (mooring) afin de visiter New York pour quelques jours.  Nous débarquons du bateau et allons sur la rue Amsterdam dans le Upper West Side ou est située la marina afin de s’imprégner un peu de l’ambiance de New York et essayer de se trouver un restaurant qui accepte les chiens en terrasse (mais nous ne sommes pas trop optimistes sur ce point).  Nous venons d’arriver à cette boule d’ancrage et nous ne connaissons pas le secteur.  De plus, les courants sont importants à cet endroit et il annonce de forts vents alors nous ne sommes pas confortables de laisser Fluffy toute seule dans le bateau.  C’est un défi que l’on aura tout au long du voyage.

On voit, devinez quoi? Au Crave Fish bar, des huitres à 1$ pour le 5 à 7, en plus de la bouteille de mousseux en spécial à 30$.  En plus ils acceptent les chiens en terrasse!  C’était super bon mais il a commencé à pleuvoir vers 7h, nous étions abrités sous une marquise mais pas Fluffy…Alors on a eu pitié de notre paquet de poil à quatre pattes et nous sommes allés chercher une pizza chez  Made in New York Pizza, qui était très bonne et que nous avons mangé sur le Air Cool.  Pour les navigateurs qui nous lisent et qui pensent faire ce voyage avec leur compagnon à quatre pattes, sachez que dans le Upper West Side, les chiens sont acceptés sur pratiquement toutes les terrasses.

Lorsque nous nous couchons cette nuit-là, on se doute pour l’avoir lu à plusieurs reprises que ce mouillage peut être « rowly » (ou roulant en français).  Vers minuit le vent s’est levé.  Nous entendons ensuite rapidement la vaisselle se promener dans les armoires et tout ce qui n’était pas fixé roule sur le plancher du Air Cool.  Joie.

Petit détail technique pour ceux que ça intéresse, un voilier se positionne toujours nez au vent ce qui occasionne un mouvement de balancier avant-arrière qui n’est pas inconfortable.  Mais lorsque le courant égalise les forts vents contraires à la direction du courant, tu te retrouves de côté dans la vague avec un mouvement de gauche à droite (tsé celui qui occasionne le mal de mer).  Nous devons nous tenir après les comptoirs et les murs si on veut rester debout pour être en mesure d’aller chercher les biscuits soda et les gravols nécessaires à la survie de cette nuit-là.

Le lendemain matin on se réveille…. pas super frais de notre nuit…  Il annonce des vents relativement faibles et de la pluie alors on décide d’aller visiter le Musée d’histoire naturelle de New York que nous voulions voir depuis longtemps (sans Fluffy bien sûr).  Ce musée est vraiment impressionnant et nous avons adoré.  C’est beaucoup d’informations pour la demi-journée que nous avions pour visiter mais c’était très intéressant.  Les squelettes de dinosaures sont particulièrement un incontournable.  Par la suite, puisqu’on a congé de chien, nous décidons d’aller manger des sushis chez Haru dans le Upper West Side. Nous nous couchons ce soir-là et nous dormons comme des bébés.

Le vendredi 4 octobre, nous allons marcher à Central Park avec Fluffy car j’avais tellement hâte de faire cette activité et je harcelais Marc-André avec cela depuis longtemps, ça n’était donc pas optionnel!  C’était là ou jamais, car nous avions convenu de partir le lendemain pour Sandy Hook au New Jersey vu qu’une fenêtre météo se de dessinait pour le mardi suivant afin de faire notre passage en mer de 22h vers Cape May.  Merveilleuse journée d’automne à Manhattan, on en a profité au maximum. 

L’après-midi, nous nous arrêtons sur une terrasse afin de relaxer un peu.  Comme nous étions dans le Upper West Side et que nous étions hors des sentiers touristiques, nous avons pu constater à la sortie des classes que pratiquement tous les enfants en majorité blancs étaient accompagnés de leur nounou.  Les parents, dans le Upper West Side en tout cas, on donc souvent une nounou pour les aider avec leurs enfants, ce qui en fait une réalité bien différente de la nôtre au Québec.  Nous arrêtons ensuite à l’épicerie fine Citarella afin d’acheter des bagels (puisque nous étions à NY j’avais une fixation là-dessus) et des ingrédients afin de faire des pâtes au bateau pour le souper, avec baguette de pain frais en prime et un beau coucher de soleil sur Manhattan. 

Comme il annonçait des forts vents pour cette nuit-là, on était prêts mentalement.  Une chance car on a passé une nuit encore pire que la première.  Mais là, nous étions prêts, tout était fixé dans le bateau et les biscuits soda et les gravols étaient proches de nous.  J’ai même mangé mon fameux bagel le lendemain matin.  Je pense que c’est Fluffy qui a passé la pire nuit haha.

Fluffy en lendemain de veille

Comme nous sommes tannés de nous faire brasser, nous sommes presque contents de partir de Manhattan pour Sandy Hook ce matin-là.  Il y a beaucoup de trafic maritime en ce samedi matin dans la Hudson.  Il y a des barges, des bateaux de croisières, des bateaux et navettes pour touristes, des voiliers et des gros bateaux moteurs… qui nous font tous une belle vague que le Capitaine doit prendre en compte dans sa navigation.  Nous passons devant la Statue de la Liberté mais impossible de trop s’approcher pour aller prendre des photos comme nous voulions le faire car le trafic vis-à-vis la Statue est beaucoup trop intense.  Mais sinon, sortir de Manhattan en voilier était vraiment impressionnant et on va s’en rappeler longtemps.  Quel privilège on a de vivre cela malgré les petites aventures de notre quotidien!

Comme nous nous dirigeons vers Sandy Hook, nous croisons des gros porte-conteneurs, car nous passons tout près des routes de la marine marchande qui vont vers New York.  On aperçoit même Adrien porte conteneur de Maesk qui est un des plus gros paquebot au monde…. Très gros.  Plus on avance vers Sandy Hook, on a comme un petit feeling de navigation en Océan, puisqu’on est tout près de l’Océan Atlantique Nord.  L’eau commence à être assez salée.  Aussi, un sentiment de liberté nous habite.

Après environ 5 heures de navigation, nous mettons l’ancre dans la Baie de Sandy Hook à côté de nos amis Louise et Pierre de Point Final! qui nous ont devancé de quelques jours.

Nos amis Louise et Pierre sur Point final! à l’ancre à Sandy Hook au lever de la lune

Le lendemain matin en nous levant, lorsque nous avons regardé la météo à venir (en voilier, tu regardes la météo au moins 2 fois par jour et une fois par quatre heures dans mon cas), la fenêtre météo du mardi s’était refermée et était inexistante.  À la place, il annonçait du 40-45 nœuds de vent (environ 70-80 km/h) toute la semaine, ce qui pour une première navigation dans l’Océan n’était absolument pas envisageable.  Le tout du à la tempête Mélissa.

Ben oui, c’était ça Mélissa….

Les conditions idéales que nous recherchons sont entre 10-15 nœuds de vents idéalement du nord avec une composante Ouest.  Encore un peu de technique, nous aimerions des vents du Nord pour être au portant c’est-à-dire avoir le vent dans le dos car c’est plus confortable et avec une petite composante ouest car le vent vient de la terre et non de la mer qui est à l’est, ce qui ferait monter la vague.

Le Capitaine n’est pas super content car on ne s’attendait pas à passer toute la semaine à Sandy Hook, mais en bateau, on n’a pas le choix de s’adapter à la météo.  Vu qu’on a du temps devant nous, le Capitaine décide de profiter de ce petit temps mort pour faire du travail sur le Air Cool.

En effet, une tâche pas trop agréable est à faire.  Celle-ci consiste à relier le réservoir septique au passe-coque (valve qui permet le rejet direct à la mer) car beaucoup d’entre vous en seront étonnés mais vider le réservoir septique est permis à plus de 5 miles des cotes et plusieurs endroits dans le sud ne sont pas équipés pour faire la vidange du réservoir septique.  Même les bateaux de croisières font cette opération la nuit lorsque vous dormez. Nous devons donc nous y préparer.

La problématique de cette opération est que le capitaine devait relier le tuyau à connecter SOUS le réservoir septique.  Après une nuit presque blanche du Capitaine à penser à ce qui s’en venait et après une demi-journée afin de rassembler son courage, nous sommes donc aller vidanger le réservoir septique à la marina afin de le vider complètement.  Nous sommes retournés nous ancrer pour faire l’ « Opération ».  Afin de connecter le tuyau, le Capitaine devait tout d’abord enlever le tuyau SOUS le réservoir. 

Tuyau à connecter…

Après 1 heure de combat avec le bouchon qui était très collé, le Capitaine réussit à enlever ledit bouchon mais à l’intérieur se trouvait un autre genre de bouchon dont on vous laisse imaginer la nature et l’explosion arriva….

Shaaflaaaaaaaaaac………….. au minimum environ 10 litres de ce que vous vous imaginez se déverse.  Par chance, le Capitaine avait mis un sac de vidange et une chaudière dessous mais cela n’a malheureusement pas tout à fait suffit et une certaine quantité de vous savez quoi s’est retrouvée dans les cales du bateau. . .Familles et amis qui sont venus nous visiter sur le bateau, le Capitaine a pu constater que vous étiez encore beaucoup plus près de nous que vous ne le pensiez et nous aussi.  Ce que nous avons appris avec cette aventure, c’est que la vidange d’un réservoir septique ne se fait jamais complètement.  Un nettoyage en règle du bateau et des cales a suivi.

À part cette petite aventure, la semaine se déroule tranquillement. Au menu de la semaine: cuisine, lecture, relaxation, Netflix et surtout préparation mentale pour la traversée en mer à venir vers Cape May.

Coucher de soleil sur Sandy Hook

L’autocuiseur diabolique

« Il n’y a pas de problème qui résiste indéfiniment à une absence de solution « 

Anonyme

Après une bonne nuit de sommeil à Whitehall, il nous restait encore toutes les autres écluses (11 ) à faire jusqu’à l’Écluse Fédérale de Troy et ensuite se rendre à Catskill pour remâter. Voici ce à quoi ressemble un passage dans une écluse (la #12, gracieuseté de Pierre et Louise du Voilier Point Final! qui ont filmé le chef d’oeuvre… heureusement on n’entend pas la barre de flèche grafigner)-voir texte précédent.

Notre baptême des écluses…

Notre plan pour cette journée était de dormir à Fort Edward au quai municipal, soit après l’écluse #7, donc faire 5 écluses cette journée-là, comme nous ne sommes pas trop pressés par le temps. Belle navigation tranquille et nous avons fait les écluses comme des pros haha.

Une fois arrivés à Fort Edward, nous apercevons le fameux quai municipal. Panique à bord, il est tellement haut et nous ne pouvons trop approcher du mur parce que l’on accrocherait la barre de flèche (ben oui encore elle). Le Capitaine me dit alors: ben on va improviser. Heu attends minute Capitaine, là tu veux qu’on improvise alors le plan c’est qu’on approche du mur mais pas trop pis après on verra… que je me pende ensuite à une échelle qui sera clairement trop loin du bateau pour finalement essayer d’accoster le bateau mais en faisant attention de pas trop coller le devant du bateau à cause de mon amie barre de flèche? Le tout sans tomber dans l’eau, qui a une couleur de plus en plus spéciale. Je ne pense pas Capitaine.

Sauvée par ma bonne étoile, un monsieur que l’on croit être un capitaine d’un autre bateau, nous offre son aide pour accoster ce que je m’empresse d’accepter considérant la situation. Par contre, force était de constater que 1-le monsieur n’était pas super en forme et quand tu accostes un bateau il faut que tu te déplaces vite et 2-le monsieur n’avait clairement jamais accosté de bateau de sa vie. Il nous jasait ça en accostant afin de nous vanter les mérites de sa ville alors que le Capitaine lui donnait des directives (« stop the boat sir, please just stop the boat »-question de ne pas rentrer dans le bateau en avant) en essayant de garder son calme. 1 minute c’est parfois long. Finalement, le monsieur ralentit le bateau assez pour que je puisse agripper une échelle et que je puisse sortir accoster comme il se doit le bateau sans rien endommager. Fiou.

Après avoir repris notre souffle et peut-être bu une petite bière ou trois, nous avons été visiter brièvement Fort Edward. C’est une petite Ville américaine typique mais ou bien des maisons semblent plus ou moins bien entretenues. Jusqu’au nord de New York, nous aurons cette impression à chaque fois en débarquant dans une petite ville, qu’à un certain moment il y a eu beaucoup de richesses le long de la Rivière Hudson, mais que maintenant la vie est beaucoup plus difficile pour ses habitants, le contexte socio-économique n’étant évidemment plus le même.

Le lendemain (23 septembre), direction quai municipal (on aime les quais municipaux parce que c’est gratissss) de Waterford et les écluses 6 à 1. Nous allons arrêter juste avant l’écluse Fédérale de Troy, qui elle n’a pas le même fonctionnement que les autres écluses car il n’y a pas de câbles qui pendent du mur pour s’y accrocher. C’est un autre dossier, on y pensera demain… Car il faut naviguer aujourd’hui et le paysage change de plus en plus. C’est de plus en plus industriel et nous avons un petit défi de navigation de plus vu que les bouées rouge et vertes balisant le chemin changent de côté versus ce qu’on est habitué au Lac Champlain à cause du sens de la remontée qui n’est plus le même. Journée impressionnante qui nous fait commencer à sentir que nous sommes rendus assez loin de chez nous. Attention de ne pas vous diriger dans la chute à l’écluse #5 ou la #1.

Nous sommes arrivés à Waterford vers 16h. Nous avons été accueilli par les très gentils bénévoles du Waterford Visitor Center au quai municipal, ou une dame de 104 ans environ nous a expliqué les restaurants et attractions touristiques du secteur, afin de dynamiser l’économie de la Ville. Nous avons donc décidé de commander de la pizza (excellente et livrée directement au bateau) et de rester à ce quai pour la journée du lendemain afin de se réapprovisionner (les épiceries locales prêtent un panier pour le retour au bateau) et se préparer mentalement pour la dernière écluse.

25 septembre, départ de Waterford en direction de Catskill pour enfin remâter le Air Cool. La journée commence avec la $%?$%?E%?&$*?$%? d’écluse Fédérale. On savait qu’il y avait des tuyaux sur lesquels accrocher les amarres et nous avions notre plan. Je passais l’amarre de M-A sur le tuyau vis-à vis de lui dans l’écluse et ensuite j’allais passer la mienne sur mon tuyau.

Bon plan, sauf que…. en entrant dans l’écluse, les tuyaux sont si éloignés que nous allons juste pouvoir utiliser un tuyau pour les deux amarres. Pense vite ma grande. Finalement, ça a été correct mais si vous passez par cette écluse, vous serez prévenus. Les écluses sont enfin terminées, soulagement pour tout l’équipage.

Lors de la navigation, on passe devant Troy et Albany. Plus on va au sud, plus c’est populeux et industriel. Encore une grosse journée de navigation pour Fluffy, qui pratique son sport favori.

Lorsque nous arrivons à la Marina Riverview à Catskill vers 15h, nous accostons Air Cool au quai et nous prenons entente avec la marina pour remâter pour le lendemain dès 8h. YESSSSSSS!!! Nous nous sommes rendus en vie et sans dommages.

Le lendemain matin, une autre grande journée pour le Air Cool, on remet enfin son mât et il sera un voilier manœuvrable à nouveau. Bye barre de flèche, je ne m’ennuierai pas de toi. Voici un petit vidéo du Air Cool en train de se faire remâter partiellement.

Enfin!!

Par contre, quand tu fais de la voile, on dirait que tout se mérite. Alors tout ne s’est pas passé sans encombres. Juste avant de partir de notre marina au Québec, nous avions fait changer les pataras (fils d’acier qui retiennent le mât situés en arrière du bateau) sous garantie. Excellent service! Par contre, lorsque le mat était en équilibre debout au bout de la grue et que Marc-André et l’équipe de la Marina Riverview a voulu attacher les fils d’acier pour le faire tenir, ben ils étaient trop courts…. Bon…. Après une petite frousse (encore une fois il faut penser vite), le Capitaine s’est dit qu’il allait essayer de tout serrer les autres fils d’acier, des fois que ça aiderait car il manquait quand même quelques pouces. Après beaucoup d’huile de coude, nous avons réussi à attacher les fameux fils d’acier mais de justesse. Quelques ajustements seront nécessaires plus au sud mais c’est vivable pour le moment. Encore une bataille de gagnée. Il n’y a aucune mais bien, aucune journée pareille quand tu fais de la voile et tu n’as jamais de routine. Vous commencez à comprendre pourquoi…

Le lendemain, 28 septembre, on a remis les voiles (une chance qu’il ne ventait pas fort car je serais partie avec la voile du génois pendant son installation haha) et on décide de repartir. Nous avons pris ces photos des supports de mâts de tous les gens qui partent vers le Sud, dont plusieurs québécois. Ceux-ci sont entreposés à la Marina jusqu’à ce que le propriétaire vienne les remettre pour démâter et remonter au Nord avec son voilier. On peut remarquer que les supports du Air Cool sont déjà ensevelis très loin.

Le plan de la journée était de dormir à Shadows Marina, juste au nord de New York. Nous sommes super contents car avec le mât remis, le Air Cool est redevenu un voilier donc on n’a plus peur des grosses vagues des barges qui pourraient faire tomber notre mât et on peut recommencer à faire de la voile

On peut aussi tenter de régler les problèmes avec nos instruments… Car je n’en ai pas encore parlé mais depuis notre départ du Québec soit le 18 septembre, notre pilote automatique et notre compas sont non fonctionnels. Nous avons donc du barrer manuellement (à la bonne vieille façon) depuis quand même 10 jours et notre curseur sur le gps qui est un bateau qui va vers l’avant, pointe toujours vers le côté bâbord (gauche). Ce n’est pas vraiment idéal mais comme c’est l’aventure, on s’est dit que ça allait se régler lors du remâtage.

Pensée magique…. cette journée de navigation, très belle par ailleurs nous prouve bien que le problème n’est pas réglé, mais aussi que le radar est non-fonctionnel lui aussi.

Rien à faire, ça ne fonctionne pas. On se dit que l’on arrêtera à une marina à Croton on Hudson le lendemain, ou il est indiqué qu’ils ont des mécaniciens et autres services de réparation. Mañana.

Nous arrivons à Shadows Marina à Poughkeepsie vers 16h. Très bon accueil et ils ont super restaurant avec des huîtres à 1$ et toutes sortes de tapas de fruits de mer pas chers. On se gâte et en prime nous avons un beau coucher de soleil et une merveilleuse vue du Mid-Hudson Bridge illuminé.

29 septembre, départ pour Croton On Hudson, ou on espère enfin régler nos problèmes. Il y a de la lumière au bout du tunnel, on est confiants de régler ceux-ci et on a hâte de passer quelques jours à Manhattan. Belle navigation, on appelle même la marina vers 11h30 pour leur dire que nous serons là vers 16h et que nos défenses et amarres sont du côté bâbord du bateau. Bien relax, nous sommes rendus des professionnels.

Nous avons vu un château hanté (Fort Bannerman’s), l’académie West Point (plus vieille académie militaire des USA) et ses remparts et nous nous sommes finalement rendus au bout du monde 😂 .

Arrivés tout près de la marina, nous rappelons le responsable des quais pour lui signaler notre arrivée prochaine et que nos choses pour accoster sont à bâbord. Il nous dit qu’il n’y a pas de problème et de le rappeler sur la radio quand nous serons arrivés. Je le rappelle à l’approche de la marina pour lui confirmer que nous entrons et que nous accosterons sur bâbord. On voit un dude en short qui nous fait signe mais l’endroit ou il est nous semble bizarre pour accoster notre voilier. Il faut savoir qu’à ce moment-là il y a beaucoup de courant dans la Hudson et qu’il y a beaucoup de trafic maritime donc on lui fait confiance. Lorsqu’on arrive plus proche de lui je le rappelle à la radio pour lui demander ou on accoste. Là je vois la panique dans ses yeux et il avait l’air égaré. Il change de quai et nous indique un quai super étroit avec un cruiser monté sur un lift hydraulique comme voisin. On n’a plus le choix, il y a du courant, pas d’espace pour manœuvrer et il est sur le quai avec un collègue pour nous accoster. Ce qui devait arriver arriva, une belle scratch sur la peinture du Air Cool sur le pilier de métal du lift hydraulique du voisin. Le dude de la marina avait oublié malgré nos 3 appels que nous allions accoster coté babord. Dah?? Il commence à nous dire qu’il est super désolé que ce n’était pas le bon quai pour nous mais qu’il est en instance de divorce et qu’il oublie tout et que sa vie est pas facile et qu’il va nous faire un rabais sur le quai…. Le Capitaine a un peu pété sa coche avec le dude et lui mentionne que si il veut nous rendre service qu’il nous réfère un technicien ou du moins un de leur mécaniciens pour aider à régler nos problèmes d’instruments, tout en balayant la crotte de canard sur le quai vu que ce n’était pas le bon quai. Bref, on s’est bien rendus compte très rapidement que personne à cet endroit ne pourrait nous aider. Le bout du monde…. ben c’est effectivement là.

Commence alors le « trouble shooting » par nous-même… vu que c’était la fin de semaine en plus. On s’est retapé la lecture du manuel de fonctionnement du gps et même celui de l’installation, les recherches google, vidéos Youtube, forums de voile, etc… afin de trouver comment réparer le problème. Ha oui, on avait du faire changer la VHF aussi, alors elle ne « parlait » pas au gps. On a réussi à faire la configuration de la VHF, on se disait que vu que tout est lié, peut-être que cela guérirait les autres instruments. Malheureusement non. Le lundi, appels à la marina, appels chez Simrad, gossage avec les instruments, Marc re-vérifie toutes les connexions (merci J-F) avec le multimètre, tout semble ok. La journée passe, Marc-André commence à être fort de mauvaise humeur. On ne veut quand même pas rester tout l’hiver à Croton-Ville mais on ne veut pas naviguer dans le trafic de New York avec des instruments qui n’indiquent pas la bonne lecture.

Le lendemain, on continue à « trouble shooter »… en bateau ça va souvent en éliminant des choses. Marc-André finit par parler à Simon le technicien de la marina Gosselin qui lui explique que c’est fort improbable d’avoir 2 problèmes (radar et erreur de compas du pilote automatique) en même temps et de plutôt chercher la source de l’erreur de déviation du compas, ce que nous tentions quand même de faire depuis quelques jours mais avec le radar et la VHF, ça faisait trop en même temps, on s’éparpillait et on devenait fou. En commençant à focuser sur ce problème, il indique à M-A où se trouve le sensor du compas (en-dessous de notre lit, nous ne savions pas).

On commence à chercher et devinez qu’est-ce qui était rangé dans un autre compartiment à l’extérieur du bateau mais à proximité du compas:

Le COUPABLE

Ben oui, l’autocuiseur que nous avions acheté juste avant de partir et qui a été rangé rapidement ou il restait de la place….

Dès que nous avons enlevé l’autocuiseur, le compas est revenu à la normale. Il faut comprendre qu’un compas est très sensible aux champs magnétiques produits par un morceau de métal et qu’un autocuiseur…ben c’est juste ça du métal. On s’est trouvé tellement cons hahaha…. Le radar par contre, a un problème plus sérieux et nous allons devoir aller le faire vérifier chez un expert qui se trouvera sur notre route dès que possible.

Mais là, on veut juste partir de Croton et s’en aller à La Grosse Pomme, ce que nous avons fait dès le lendemain matin!